55167229994901963466777199

RASSEMBLEMENT HARKI informer, rassembler, agir !
  • Accueil
  • Le Rassemblement Harki
    • Qui sommes nous ?
    • Agissons !
    • Agenda&Galerie
  • ***ACTIONS JURIDIQUES***
    • La charte
    • Nos objectifs
    • Juridique >
      • Rapports&Etudes
      • Analyses
      • Textes légaux
      • Décisions
      • Traités&Conventions
      • Propositions de loi
  • *A la une !
  • *Histoire&Mémoires
    • Qui sont les Harkis ?
    • L'Armée d'Afrique et l'armée coloniale des origines à 1962
    • Les suppletifs rallies dans les guerres irregulieres
    • Harkis et supplétifs
    • Les oublies d Indochine
    • De la colonisation a la pacification de l’Algerie
    • Le F.l.n
    • Les Européens disparus en Algérie >
      • Liste nominative de disparus
    • Repères chronologiques
    • Mise au point
    • L' abandon des Harkis >
      • Les accords d'Évian
      • Le massacre des Harkis
      • Croix-rouge 1963&Harkis prisonniers
      • Les justes
      • L' accueil des Harkis
      • Les camps
      • Traumatismes-post-guerre"
    • *Témoignages&Contributions
    • *À voir, à lire
  • Infos pratiques&Nous contacter
    • Plan du site
j'agis, je rejoins fièrement la communauté militante, je télécharge la charte et j'adhère au lancement des actions juridiques pour et par les Harkis et leurs familles
CONTACT​  :  REDACTEUR.RASSEMBLEMENT.HARKIS@GMAIL.COM
Tweet to @MouvementHarki
"On ne doit aux morts que ce qui est utile aux vivants, la Vérité et la Justice"
accueil
L'accueil des Harkis
Pour tout renseignement sur les différentes actions juridiques * qui ont été élaborées par nos militants et des avocats, contactez nous : actionsjuridiques.harkis@gmail.com
Liste des 146 personnes décédés au camp de Rivesaltes établie par année, et ordre du décès par les services de l'ONACVG

​​Faire défiler les rubriques en cliquant sur les flèches à gauche et à droite
  • ​L’Accueil et le reclassement des Harkis en France (1962-1964)
  • Le logement des Harkis : Une ségrégation au long cours
  • De l'Algérie à la France
  • Vidéos INA.FR
  • Nous contacter
  • Presse
<
>
​L’Accueil et le reclassement des Harkis en France (1962-1964)

Par Abderahmen Moumen « Le XXe siècle a été le siècle des camps.
​C'est même au tournant de ce siècle que furent érigés les premiers. Le système se développa ensuite sur tous les continents et dans tous les régimes. »
 [1].

C’est ainsi que Denis Peschanski introduit sa thèse publiée sur la France des camps, essentiellement focalisée sur la période de la Seconde Guerre mondiale.
Les camps, dans des fonctions tout autant diverses mais dans la continuité de cette longue histoire de l’internement en période de conflit, réapparaissent avec la guerre d’indépendance algérienne à l’endroit des militants et combattants nationalistes algériens, partisans français de l’indépendance et activistes de l’OAS [2], et enfin, dans le contexte des migrations politiques de l’Algérie post-indépendance, en direction des anciens supplétifs et leurs familles. 
​
La proclamation des Accords d’Evian le 19 mars 1962 constitue ainsi le prélude du passage dans des espaces de confinement d’une partie de ces familles qui réussissent à se réfugier en France.

Le Gouvernement sollicite le ministère des Armées pour aménager des camps militaires en camps de transit et de reclassement pour quelques milliers de personnes sur le territoire métropolitain. 
​Les prévisions des pouvoirs publics envisageaient ainsi le règlement de cette question en un été, avec le « transfert » de peu de « réfugiés musulmans » au reclassement rapide.
Le camp du Larzac (Aveyron) ouvre ainsi ses portes le 15 juin 1962 (jusqu’au 15 octobre), mais devant l’afflux de réfugiés, un deuxième camp est ouvert à Bourg-Lastic (Puy-de-Dôme, 24 juin – 25 septembre).
​Très rapidement, c’est plus de 10.000 réfugiés qui sont regroupés dans ces camps [3].
​
La fermeture rapide de ces ca​mps ne se déroule cependant pas selon les prévisions du secrétariat d’Etat aux Rapatriés du fait des flux de réfugiés continuels, et surtout des lenteurs dans le reclassement du fait du problème de sécurité des anciens supplétifs menacés par des membres du FLN, des réticences des employeurs ou de certains syndicats, des difficultés de logement, et de l’afflux massif des « rapatriés européens d’Algérie » mettant au second plan celui des « rapatriés musulmans »…
Collectif National Justice pour les Harkis
Ainsi, ne pouvant maintenir des milliers de familles sous l’hiver rigoureux de l’Auvergne ou de l’Aveyron, les camps du Larzac et de Bourg-Lastic ferment leurs porte​s durant les mois de septembre et octobre 1962. 
​Les familles sont finalement transférées à Rivesaltes (Pyrénées-Orientales, septembre 1962 – 31 décembre 1964) et Saint-Maurice l’Ardoise (Gard, 29 octobre 1962 – 1er décembre 1963) [4] dans un contexte d’urgence, de méfiance et d’interrogations sur le devenir de ces « réfugiés musulmans ».  
​
Collectif National Justice pour les Harkis
Une ouverture entre urgence et méfiance

Les camps de Saint-Maurice l’Ardoise et de Rivesaltes font partie du domaine militaire, mis à la disposition du ministère de l’Intérieur.
Outre leur usage militaire, ils ont déjà été utilisés soit pour l’internement de populations durant la Seconde Guerre mondiale (Espagnols, juifs, Tziganes à Rivesaltes par exemple) soit pour l’assignation à résidence durant la guerre d’indépendance algérienne (militants nationalistes algériens voire membres de l’OAS à Saint-Maurice l’Ardoise). 

Face aux réticences préalables du ministère des Armées à prêter une partie de son domaine militaire au secrétariat aux Rapatriés, les mesures d’urgence ne sont pas prises dans l’immédiat pour accueillir ces milliers de réfugiés.
Ainsi, les unités du Génie, qui devaient préparer le camp de Rivesaltes et surtout la construction de baraquements, n’y sont envoyées qu’après la fin de leurs manœuvres soit le 15 octobre, bien après les premières arrivées…

C’est ainsi sous les tentes que les familles doivent affronter l’hiver et les bourrasques de la Tramontane.
Une véritable ville de près de 10.000 personnes pousse en quelques jours à proximité de Perpignan, devenant la deuxième « ville » du département.
Le 23 octobre 1962, le camp de Rivesaltes compte ainsi 9.620 personnes dont 4.660 enfants, avec une moyenne de 45 naissances par mois, 1.910 femmes et 3.050 hommes.

Quant au camp de Saint-Maurice l’Ardoise, ouvert le 29 octobre 1962, il occupe une superficie d’une quinzaine d’hectares, entourés par des fils de fer barbelés.
Prévu à l’origine pour 400 personnes, il en accueille vite plus de 5.000.
On y construit à la hâte cinq groupes de bâtiments, d’un total d’une quarantaine, numérotés de un à cinq, auxquels s’ajoutent des baraques en préfabriqué et des tentes de l’armée.
Le 24 novembre 1962, on y compte 4.868 personnes et l’effectif maximum est atteint le 5 janvier 1963 avec 5 542 personnes (2 246 hommes dont 1 306 célibataires et 940 mariés, 1 082 femmes dont 137 célibataires et 945 mariées, 2 214 enfants dont 1 178 garçons et 1 036 filles) [5].

Face à cet afflux, le château Lascours est d’ailleurs réquisitionné pour les familles de réfugiés.

Si l’arrivée tumultueuse de ces milliers de familles attirait la compassion pour certains, les harkis du camp de Rivesaltes furent l’objet d’une véritable campagne de presse hostile avec Le Travailleur catalan, journal du parti communiste local, entre septembre et novembre 1962.
​
Un billet régulier dénonce l’installation d’un camp de transit à Rivesaltes qualifié de « dépotoir » et désignent les anciens supplétifs comme des « mercenaires », des « hommes à tout faire », voire des « racailles ».  

Les titres des articles sont éloquents :
22 septembre 1962 :
​« Rivesaltes à l’heure des harkis », 29 septembre :
« Pas de villages de toile à Rivesaltes » ;
13 octobre :
« Rivesaltes. Que compte faire le conseil municipal pour nous débarrasser des harkis » ;
3 novembre :

« Rivesaltes aura-t-elle une municipalité harki ? ».

La méfiance vis-à-vis de cette population sera d’ailleurs de mise surtout bien entendu lors de l’installation des camps, une méfiance qui s’amenuise au fil du temps cependant.
Il nous faut rappeler un contexte particulier où les anciens supplétifs sont aussi menacés sur le territoire français par des militants du FLN.
La Fédération de France du FLN surveille, fiche, renseigne toute arrivée d’Algériens inconnus, à la recherche d’anciens supplétifs.
En même temps que soumis à une protection particulière, les anciens supplétifs sont suspectés d’une possible collusion voire récupération de la part de l’OAS qui poursuit ses attentats en France, afin d’assassiner ceux qui ont « liquidés » l’Algérie française, De Gaulle en tête.
Ainsi, les anciens supplétifs se retrouvent dans une situation paradoxale où les pouvoirs publics les surveillent par méfiance et les protège en même temps.
Par une note de Pierre Messmer, ministre des Armées, datée du 27 octobre 1962, précisant que « les agglomérations de musulmans que constituent les camps peuvent donner lieu à des incidents ou manifestations susceptibles de troubler l’ordre public » [6], le renforcement des unités de gendarmerie devient effectif à proximité des camps de Saint-Maurice l’Ardoise et Rivesaltes.
Les familles sont ainsi soumises à une stricte discipline surtout après la manifestation devant la mairie de Rivesaltes par des anciens supplétifs souhaitant voter et les craintes des autorités préfectorales, comme celui des Pyrénées-Orientales qui précise que « c’est avec inquiétude que l’on est en droit de se demander la résistance que pourrait opposer le détachement en face d’un mouvement concerté de supplétifs musulmans qui, souvent oisifs, rôdent à travers le camp de Rivesaltes et sont susceptibles de se renseigner sur le contenu du dépôt militaire » [7].
​
Georges Pompidou exige ainsi du ministre des Armées que« le camp doit être soumis à une discipline qu rend indispensable la proximité de Perpignan où des incidents se sont déjà produits.
Les méthodes qui sont suivies à Saint-Maurice l’Ardoise et qui donnent des résultats satisfaisants me paraissent devoir être reprises à Rivesaltes.
Il y a de l’intérêt même des réfugiés qui sont d’ailleurs habitués à une organisation de type militaire comportant un encadrement solide.
​Pour éviter le retour des difficultés qu’ont entraînées les déplacements à Perpignan, il conviendra de soumettre les allées et venues à une certaine surveillance, les sorties du camp ne doivent être autorisées que pour des motifs sérieux » 
[8].
Collectif National Justice pour les Harkis
Une situation humanitaire dramatique

L’impréparation des autorités civiles et militaires, malgré la constitution de compagnies de camp comme unité support à sa gestion, entraînent des difficultés pour désemplir rapidement les camps. 
Ainsi, des infrastructures d’accueil quasiment inexistantes ajoutées à un afflux massif des familles d’anciens supplétifs aboutit à une situation humanitaire dramatique dès l’ouverture des camps jusqu’au premier trimestre 1963, où les conditions de vie s’amélioreront progressivement. 
Ceci entraîne l’interdiction du camp à tout civil non autorisé et particulièrement aux journalistes afin de ne pas médiatiser cette situation tragique et éviter une exploitation politicienne [9]. 
Une délégation du Conseil économique et sociale est d’ailleurs empêchée d’effectuer, en janvier 1963, une visite dans les camps de harkis. 
​Les divers rapports qui se succèdent durant cette période des premiers mois de la transplantation sont unanimes dans ce constat d’un drame humain en cours.

​
Collectif National Justice pour les Harkis
Construction d’un hameau forestier par et pour les familles de harkis à Ongles (04)
« Rivesaltes est à l’image du monde où nous vivons, violent et inhumain »
​
Le rapport de la tournée de l’inspecteur SFIM (service pour les Français musulmans et d’Indochine, pendant « indigènes » ou non-européens du service des rapatriés) au camp de Rivesaltes en octobre 1962 est révélateur d’une situation non maîtrisée où rien n’a été fait pour préparer l’arrivée des familles [10].
« Le 15 octobre 1962, il pleuvait sur la ré​gion de Perpignan.
Tous les harkis, 9.000, sont sous des tentes, le camp est boueux, l’eau coule sous les tentes.
Une certaine amélioration de l’installation sanitaire a été effectuée mais les douches ne marchent pas encore, faute de personnels compétents pour les faire fonctionner. 

L’antenne du ministère des Rapatriés installée dans une baraque a procédé à l’aménagement de celle-ci de façon à la rendre presque confortable, le personnel de l’antenne est actuellement suffisant en nombre et en qualité pour faire tout le travail qui lui est confié.
Organisation du camp militaire : pas de commandement ( …) Aucune autorité n’est chargée de coordonner leurs différentes activités.
Le colonel Foque, commandant le groupe de subdivision de Perpignan, supervise tout cela de très loin.
Une compagnie de Génie vient d’arriver. Il ne sem
ble pas que des ordres aient été donnés pour faire commencer les travaux de restauration de baraques réservées aux harkis.

Il semble qu’ils en sont encore à effectuer des devis ; le colonel Foque n’a pas pu me donner de chiffres précis sur l’estimation de la restauration des baraques destinées à l’hébergement et des baraques destinées aux classes. 
(…) Il est impossible que cette situation soit maintenue plus longtemps, les familles de harkis avec leurs jeunes enfants ne peuvent absolument pas restées plus longtemps dans des tentes dont la protection contre la pluie et surtout le vent sont très illusoires.
​
Les baraques destinées aux harkis sont en très mauvais état, toitures laissant passer l’eau et surtout murs effondrés.
Il importe que les travaux de restauration soient entrepris immédiatement ; les questions de devis ne pouvant humainement retarder l’installation des familles dans des bâtiments durs.

Les bâtiments réservés aux harkis semblent insuffisants les îlots E B F de 77 baraques chacun, ne pourront loger tout le monde.
Sans attendre la mise en état de toutes les baraques, il faut commencer à loger les familles au fur et à mesure que les bâtiments seront prêts. Aucune action de promotion sociale ne pourrait être effectués efficacement dans les conditions de vie actuelle des harkis » 
[11].
Le général d’Armée Olié résume lui aussi lors de la réunion du 19 novembre 1962 au Conseil nationale des musulmans français (CNMF) la situation difficile au camp de Rivesaltes après sa visite. 
« L’administration française, civile et militaire, doit se reconvertir pour devenir rapide, souple, humaine et efficace, dans un monde en mutation rapide, dur, que menace une « déshumanisation ».
Rivesaltes est à l’image du monde où nous vivons, violent et inhumain.
Ce spectacle ne provoque pas l’indignation qu’il mériterait, tant l’idée d’un monde concentrationnaire est passée dans les normes.
En résumé, Rivesaltes n’aurait jamais dû exister. Cette situation est indigne de la France ; pitoyable : des êtres sont malheureux de notre fait.
Malgré les efforts déjà accomplis, ils vivent dans des conditions matérielles navrantes, aggravées par l’oisiveté.
L’exploitation possible de cette situation à des fins politiques ou de scandale y présente de plus un danger »
.
Il décrit ainsi leurs conditions de vie. 
« Il faut loger ces malheureux qui sont actuellement sous des tentes sans chauffage ni électricité, dans des bâtiments en dur, éclairés et chauffés. Hygiène : les installations sanitaires sont très insuffisantes.
Il faut des WC, des douches, des salles de petits soins, un personnel médical plus nombreux (il y a une naissance par jour).
La nourriture paraît suffisante.
Des vêtements sont fournis par le ministère des Rapatriés et des œuvres privées.
La scolarisation des 2.057 enfants de 6 à 14 ans doit commencer ces jours-ci ; elle est prise en charge partie par l’armée, partie par l’académie.
Les cours techniques ou de promotion sociale sont également sur le point de commencer (…) L’état d’esprit n’est pour le moment pas bon : inquiétude devant un avenir incertain, jointe à une certaine versatilité ethnique, promesses imprudentes non tenues.
​Les esprits sont ainsi prêts à accueillir n’importe quelle excitation venue de l’extérieur. Il faut évidemment vider le camp »
[12].
Même s’il reconnaît que ce n’est guère possible avant un laps de temps assez long. 
​Il conclue en expliquant que « ce douloureux problème est pour nous essentiel, capital, transcendant, parce qu’il s’agit de l’honneur national, d’une obligation de solidarité humaine, d’un témoignage de fidélité envers notre civilisation ».
Collectif National Justice pour les Harkis
RIVESALTES - 1962. Vue intérieure du Camp
Saint-Maurice l’Ardoise. « Tentes et baraques voguent sur une mer de boue »

A Saint-Maurice l’Ardoise, les témoignages vont aussi dans le même sens.
La description la plus parlante en est donnée par un rapport du docteur Andrée Heurtematte, médecin-chef au service de médecine infantile de l’hôpital Sainte-Marthe d’Avignon [13].
Dans une lettre adressée le 26 janvier 1963 au député-maire d’Avignon et au préfet de Vaucluse, elle alerte sur la situation médicale et sanitaire déplorable des réfugiés de Saint-Maurice l’Ardoise et Lascours et de ceux reçus à l’hôpital de Sainte-Marthe d’Avignon [14]. Elle avait déjà tenté d’informer plusieurs personnalités importantes « des conditions déplorables dans lesquelles étaient tenus les harkis et leurs familles concentrés au camp de l’Ardoise et au camp de Lascours », mais l’une lui avait répondu qu’elle ne pouvait pas faire grand chose et une autre que la question ne l’intéressait pas… 
Elle s’est donc tournée vers le préfet : « Comme je sais que vous êtes sensible à ce qui se passe dans notre région, je me permets donc de vous signaler ces faits qui ne peuvent laisser personne indifférente ».

Elle tient ses renseignements, en particulier, d’un médecin du camp qui y fait son service militaire, dont elle préserve l’anonymat, et qui, indigné de la manière dont procèdent ses collègues les médecins militaires, lui a exposé dans le détail les conditions de vie des réfugiés.
Saint-Maurice l’Ardoise et Château Lascours abritent alors environ 6 000 personnes, dont beaucoup de familles nombreuses, qui logent dans des tentes et des baraquements : 
« Les baraquements sont abominables, sales et froids. Tentes et baraques voguent sur une mer de boue quand il pleut ou à la fonte de la neige ».
Nous sommes alors en plein hiver 1962-1963, avec un froid rigoureux, et le problème le plus délicat est celui du chauffage. La vie sous les tentes est par ailleurs préférée, car il est plus facile d’obtenir une chaleur suffisante. Dans les baraquements, la plupart utilisent des poêles dont ils font sortir le tuyau en cassant le carreau d’une fenêtre.
La nourriture est insuffisante et préparée dans des conditions très défectueuses et la ration des enfants de moins de 2 ans ne comporte qu’une boite de lait tous les deux jours.
Depuis l’arrivée des premiers réfugiés jusqu’au mois de janvier 1963, les conditions des soins au camp sont jugées affreuses : aucune installation prévue pour les consultations des médecins ni d’infirmerie organisée.
La responsabilité médicale incombe à un médecin capitaine de carrière « absolument nul, anéanti par son chef hiérarchique, le commandant du camp. 
Le travail était donc fait par les médecins du contingent qui se promenaient avec une bougie pour examiner les gorges et qui étaient considérés comme des fous quand ils émettaient la prétention de déshabiller un malade »
. 
La visite, publique, se passe au milieu de la tente ou de la baraque.
En ce qui concerne le matériel médical, un seul thermomètre est disponible. Les véhicules, camionnettes, ambulances, sont anachroniques. 
« Un détail pittoresque : il y a une seule roue de secours bien usagée pour deux ambulances, lorsque les ambulances se croisent, celui qui va vers l’extérieur récupère la roue ». 
Les médecins, ne pouvant faire d’opérations médicales, ils doivent se battre pour obtenir le transfert de malades dans les hôpitaux de Nîmes et d’Avignon,« le commandant ne voulant pas nous encombrer », contribuant ainsi à de nombreux décès.
Certains enfants sont arrivés mourants et sont morts en raison des lenteurs administratives, de papiers qui n’étaient pas en règle et pour lesquels des heures décisives ont été perdues.
Cette situation provoque un vaste scandale.

D’autres personnalités sont alertées sur les conditions de vie à Saint-Maurice l’Ardoise et Lascours.
Ainsi, le chef de cabinet du premier ministre Georges Pompidou visite le camp pour débloquer des crédits d’urgence.
Le 13 janvier 1963, une délégation du Secours Catholique, arrive aussi, cependant, « le commandant aurait déclaré que tout allait pour le mieux et qu’il n’avait besoin de rien ». 
Au début du mois de janvier 1963 également, un médecin colonel, supérieur hiérarchique du médecin capitaine, est dépêché sur place : 
« c’était un homme de valeur qui a redonné le moral aux médecins du contingent »[15]. Il trouve, dans le camp même, tout un matériel en parfait état et inutilisé : des thermomètres, des seringues, des aiguilles.
En peu de jours, il édifie un groupe de consultations, une maternité (le rythme des naissances est de trois à quatre par jours), et des locaux d’infirmerie pour les adultes et pour les enfants.
Il fait venir du personnel. Il ne reste que quinze jours, mais jette les bases de l’organisation du service de santé, dont s’occupe désormais une responsable féminine, avec l’aide d’équipes médico-sociales.
Jusqu’au 1er décembre 1963, date de fermeture du camp de transit, ce service effectuera 2 000 hospitalisations, 8 000 vaccinations, 3 200 radios, 255 naissances et traitera 1 025 cas de maladies contagieuses.
Le médecin-chef Heurtematte s’alarme aussi de la situation médicale et sanitaire des anciens supplétifs et membres de leur famille hospitalisés à l’hôpital Sainte-Marthe d’Avignon dont la majorité provient du camp de Saint-Maurice l’Ardoise.
Ainsi, à la date du 26 janvier 1963, le service de médecine infantile accueille 26 enfants à Sainte-Marthe et 16 autres au centre de convalescence de Gadagne.
Dans le service de médecine infantile, 72 enfants ont été reçus entre décembre 1962 et janvier 1963, dont beaucoup nécessitaient des soins d’urgence, voire une intervention médicale. 
« La plus mauvaise semaine se situe entre Noël et le Jour de l’An où jusqu’à 9 enfants ont été reçus à la fois en une journée, la moyenne des entrants, les autres jours de cette semaine, tournant autour de trois »
[16]. 
L’état sanitaire de ces enfants était accablant.
L’hôpital a enregistré malheureusement six décès. Certains enfants, arrivés trop tardivement, n’ont pu être sauvés malgré les tentatives de réanimation. « Un enfant est mort pratiquement à l’arrivée en le posant sur la table, deux enfants sont arrivés agonisants et sont morts dans les deux heures » [17].
Faute de place, le service de maternité doit placer deux enfants par lit, d’autres étant même couchés dans des corbeilles à pharmacie.
C’est pour jeter un cri d’alarme que ce médecin-chef décide d’envoyer son rapport au député-maire et au préfet : 
« Je pense traduire l’opinion générale de tous ceux qui ont été au contact de ces enfants et de leur famille, en vous disant que nous avons été profondément scandalisés de voir, à notre époque et dans notre pays, apparaître de telles situations. Il m’a semblé que la meilleure chose à faire était de vous en avertir ».

Des organismes de secours comme la Cimade, le Secours catholique et la Croix-Rouge, interviennent d’ailleurs pour aider ces familles démunies ne possédant que peu d’effets personnels. Le Secours catholique fournit ainsi un camion de cinq tonnes de vêtements au camp de Rivesaltes [18]. 
La construction de baraquements en dur jusqu’au premier semestre 1963 résout finalement le problème le plus inquiétant : 
le logement. 
Ce qui permet à l’autorité militaire, avec l’accord du ministère des Armées, d’ouvrir le camp à la presse à partir du 15 mars [19]. 
Ainsi journaux nationaux et locaux effectuent des articles voire enquêtes pour montrer l’oeuvre effectuée par l’armée et le gouvernement en faveur du reclassement des familles d’anciens supplétifs. 
Même la célèbre émission de télévision Cinq colonnes à la une est de la partie. 


Du reclassement des harkis à la question des «irrécupérables »


De la difficulté du reclassement


Pour vider rapidement les camps, les débats agitent les différents ministères en charge des harkis. Il avait ainsi été proposé de répartir autoritairement les familles d’anciens supplétifs selon le nombre de départements.
Le général de corps d’armée Houssay, commandant la 9e région militaire constate que le reclassement est trop lent et difficile [20] : depuis le 1er octobre 1962, sur 18.000 anciens supplétifs reçus dans les deux camps de la région militaire, 4.300 ont été recasés (dont 2/3 étaient des célibataires, des jeunes ou des éléments ayant déjà acquis une spécialité, la préformation professionnelle qui ne permet qu’un maximum de 2.000 recasés dans 6 mois, les chantiers de forestage avec un maximum de 3.000 ex-harkis, un millier de transférés à Bias en provenance de Rivesaltes et Saint-Maurice).
Il demande ainsi au ministère des Armées que « si aucune solution valable ne se présentait avant la fin de 1963, il serait préférable de disséminer les harkis par départements plutôt que de conserver dans un camp 6.000 ex-harkis et leurs familles pendant un temps indéterminé et certainement long ». 
Contredisant les experts,l’agriculture n’offre que peu de débouchés (méfiance des agriculteurs, problèmes du logement des familles, les camps sont éloignés des zones industrielles, le logement de famille est concurrencé par les migrants individuels venant d’Algérie, l’implantation dans des villages abandonnés a échoué car les familles sont ensuite « abandonnées »).
Pierre Messmer, ministre des Armées, devant la crainte de l’arrivée de près de 10.000 personnes d’Algérie veut la fermeture des camps par le ministère des Rapatriés et dénonce cet « univers concentrationnaire », souhaitant par là-même récupérer les domaines militaires et ne plus être en charge de camps qui pèsent sur le budget de l’Armée. 
« Les camps ne constituent pas une formule d’avenir. Leur organisation, fut-elle sans reproche, ils restent marqués de la tare de tout « univers concentrationnaire ».
Non seulement le système favorise le développement des épidémies, comme celle de Saint-Maurice l’Ardoise, mais il contribue à la démoralisation d’hommes, qui y perdront leur raison d’être.
En outre, sur le plan politique, il offre une cible facile à l’opposition. Le séjour dans les camps ne se justifie que dans la mesure où il permet de donner à ceux qui en sont capables des rudiments de formation professionnelle »
[21].
Il préconise de recaser 110 personnes par départements sur 10.000 par une administration centrale, soit moins de 40 emplois, mois de 40 logements à trouver par département.
La dissémination dans les départements ne sera finalement pas une décision prise par le ministère des Rapatriés, préférant en cela la transition des hameaux forestiers considérés comme « un reclassement collectif (…) pour donner le temps à ces familles musulmanes de s’adapter peu à peu à la vie rurale française avant d’être précipitées dans un secteur industriel » [22].


A la fin de l’année 1965, selon un rapport gouvernemental sur les reclassements professionnels, sur les 13.001 chefs de familles reclassés (représentant 41.342 personnes dont près de 22.000 personnes pour le seul camp de Rivesaltes) 7.053 l’ont été dans le secteur industriel (54,2%), 2.189 dans les chantiers forestiers (16,8%), 2.125 dans des professions diverses (16,2%) et seulement 1.634 dans le secteur agricole (12,6%). 
 

De Rivesaltes à Saint-Maurice l’Ardoise, la question des « irrécupérables »


Le camp de transit de Saint-Maurice l’Ardoise ferme officiellement ses portes le 1er décembre 1963 [23], les familles qui continuent à venir d’Algérie transitent toutes désormais par le château de Lascours –jusqu’au 1er juillet 1970- avant d’être dispersées. 
Quand au camp de Rivesaltes, il se vide progressivement de ses habitants tout au long de l’année 1964.
François Missoffe, ministre des Rapatriés, avait demandé en mai 1964 cependant qu’une « attitude libérale » soit maintenue pour certains cas sociaux, se préoccupant de regrouper « les déchets existant dans ce camp et dont le reclassement s’avèrera impossible », ainsi que des familles libérées d’Algérie et transférées en France [24].
L’ancien supplétif « inclassable » est d’ailleurs clairement définit : 
« un ancien supplétif possédant la nationalité française, inadapté et inadaptable sans que son instabilité atteigne le seuil pathologique »[25].
En mai 1964, les services du SFIM estiment ainsi à environ 1.000 personnes difficilement reclassables : 
60 célibataires, 100 chefs de famille (25 cas médico-sociaux, 50 vieillards, 25 inadaptés), 80 veuves [26].
Suite à une autre visite au camp le 21 mai 1964, 460 familles dont 217 constituent des incasables et 243 à reclasser sont comptabilisées. Il est précisé qu’il serait difficile de conserver la structure du camp car même avec un aménagement cela « ne supprimerait pas les conditions inhumaines de vie qui existent réellement dans l’ensemble du camp de Rivesaltes et qui limitent forcément la durée d’un hébergement » [27].

A la date du 8-9 juillet 1964, le camp de Rivesaltes compte finalement 228 familles regroupant 935 personnes considérés comme incasables : chefs de famille hommes de plus de 55 ans, chefs de famille femmes, inaptes physiques, tuberculeux [28]. 
Dans ce rapport, 168 familles groupant 781 personnes (dont 19 familles soit 55 personnes pourraient être reclassés sous réserve d’un examen médical d’aptitude) sont considérées comme retenues pour le camp de Saint-Maurice l’Ardoise, qui devient, comme le camp de Bias, une « cité d’accueil » ou « camp d’hébergement » pour des familles « inclassables » ou « incasables », des vieillards et handicapés qualifiés d’« irrécupérables ». 
Néanmoins, le problème réside dans le fait « qu’il est difficile de recenser la population incasable qui continue à entrer et à sortir du camp ». 
Certains considérés comme incasables en avril ont été reclassés, des familles de Bias sont renvoyées à Rivesaltes. Certaines familles sont recasées pour vivre hors des camps dans des logements à faibles loyers.
En septembre et octobre 1964, les départs des dernières familles de harkis reclassables s’effectuent [29]. 
Au 1er novembre, ne reste globalement que les incasables : 32 familles (hommes de plus de 55 ans) soit 170 personnes ; 64 familles (chefs de famille femmes) soit 244 personnes ; 45 familles dont le chef est inapte physique soit 183 personnes ; 32 familles (tuberculeux) soit 170 personnes. 
Soit un total de 173 familles groupant 767 personnes.
Le 16 décembre 1964, un détachement de 206 ex-supplétifs et familles quitte le camp à destination de Saint-Maurice l’Ardoise. 
C’est le commencement pour ces familles d’une vie en vase clos.
A la fin de l’année 1964, la « cité d’accueil » de Saint-Maurice l’Ardoise rassemble 420 enfants sur un total de 674 personnes, dont 88 hommes et 166 femmes, provenant presque toutes de Rivesaltes, qui ferme ses portes le 31 décembre 1964.

φC’est ainsi près de 30.000 personnes qui ont finalement transitées par Rivesaltes et Saint-Maurice l’Ardoise, sur un total d’environ 42.000 personnes passées par un camp de transit entre 1962 et 1965.
Néanmoins, la fermeture de ces deux camps de transit ne signifie en rien la fin du système de relégation spatiale mis en place à destination d’une partie, certes minoritaire, mais non moins importante de l’ensemble du groupe social « harkis ». 
Avec deux cités d’accueil, 42 cités urbaines et 75 hameaux forestiers, ces nouveaux espaces constituent le prolongement postcolonial de cette France des camps.
Les révoltes de 1975 dans les espaces de regroupement réservés aux familles d’anciens supplétifs aboutissent à la fermeture et à la destruction du camp de Saint-Maurice l’Ardoise en 1976 et à la lente résorption des cités urbaines et hameaux forestiers, et ce, parfois, jusqu’aux années 1990.
​Tous ces lieux, et avec une particulière acuité les camps de Rivesaltes et Saint-Maurice l’Ardoise, constituent de nos jours des référents importants dans la mémoire collective du groupe social harkis.
Première parution : Abderahmen Moumen, « Camp de Rivesaltes, camp de Saint-Maurice l’Ardoise. L’Accueil et le reclassement des harkis en France (1962-1964) », Les Temps modernes, n° 666, novembre-décembre 2011, pp.105-119.
Notes
[1] Denis Peschanski, Les Camps d’internement en France (1938-1946), Doctorat d’État sous la direction. d’Antoine Prost, Université Panthéon-Sorbonne, 3 volumes, 948p., 2000. 
Publiée sous le titre, La France des camps : l’internement, 1938-1946, Gallimard, 2002, 456p.
[2] Sylvie Thénault (sd), « L’internement en France pendant la guerre d’Algérie », in Matériaux pour l’histoire de notre temps, BDIC, n°92, octobre-décembre 2008, 75p.
[3] A la date du 19 juillet 1962, 11.486 personnes sont hébergées dans ces deux camps : 5.894 au Larzac et 5.592 à Bourg-Lastic.
[4] Les civils non-supplétifs sont envoyés au camp de La Rye-Le Vigeant, dans le département de la Vienne. 
Enfin, en 1963, le camp de Bias (Lot-et-Garonne, janvier 1963 – 1964) ouvre ses portes pour accueillir les anciens supplétifs célibataires, en formation professionnelle puis ceux difficilement reclassables.
​

[5] Archives départementales du Gard (AD30) CA 1559. Cabinet du Préfet.
[6] Service historique de la Défense (SHD) 1 R 336/8. Note n°42955/MA/CM du 27 octobre 1962. .
[7] Centre des archives contemporaines (CAC) 19910467/8. Courrier du préfet des Pyrénées-Orientales aux ministres des Armées, de l’Intérieur, chargé des Rapatriés, le 13 novembre 1962.
[8] CAC 19920149/1. Courrier du 8 décembre 1962.
[9] La presse est interdite de séjour dans les camps par Matignon, le ministère des Armées donne ainsi ces instructions aux deux commandants du camp par l’intermédiaire du Général commandant la région de Marseille de n’admettre aucun journaliste.
[10] CAC 19920149/1. Compte-rendu de la tournée au camp de Rivesaltes, SFIM, 16 octobre 1962.
[11] CAC 19920149/1. Compte-rendu de la tournée au camp de Rivesaltes, SFIM, 16 octobre 1962.
[12] CIMADE, 3D19/6. CNMF, réunion du 19 novembre 1962.
[13] Il est intéressant de noter que les premières études sur les « harkis » ont été menées par des médecins ou des psychiatres.
[14]Archives départementales du Vaucluse (AD84) 176 W 594.
[15]ADV 176 W 594.
[16]ADV 176 W 594.
[17]ADV 176 W 594.
[18] CIMADE, 3D19/6, CNMF, réunion du 19 novembre 1962.
[19] Cette interdiction est levée en principe le 15 février à Rivesaltes, le 1er mars à Saint-Maurice.
[20] CAC 19920149/5. Général Houssay au ministre des Armées, 8 février 1963.
[21] CAC 19920149/5. Ministre des Armées au ministre des Rapatriés, 2 mars 1963.
[22] CAC 19920149/5. Ministre des rapatriés au ministre des Armées, 14 mars 1963.
[23] SHD 13 T 239. Au 12 novembre 1963, du camp de Saint-Maurice l’Ardoise, 800 personnes doivent rejoindre des chantiers de forestage, 100 transférés à Bias, 160 regroupés au centre artisanal de Lodève et 130 n’ont aucun emploi prévu.
[24] SHD 19 T 257/2. Ministre des Rapatriés au ministre des Armées, 15 mai 1964.
[25] CAC 19920149/1. Service de reclassement des Français musulmans, 26 mai 1965.
[26] CAC 19920149/2. Note au préfet Pérony, 8 mai 1964.
[27] CAC 19970146/6.
[28] CAC 19920149/2. SRFIM, Recensement des incasables au camp de Rivesaltes, 8-9 juillet 1964.
[29] CAC 19920149/2. SRFIM, Note à l’attention du préfet Perony, 30 septembre 1964.

​
Photo
Photo
Photo
Photo
Photo
  • De l'Algérie à la France. Les conditions de départ et d'accueil des rapatriés, pieds-noirs et harkis en 1962
Durant l’année 1962, près de 650 000 personnes quittent l’Algérie pour se replier dans leur grande majorité en France. Épisode inédit par son ampleur, ce mouvement imprévu et brutal se déroule des accords d’Évian aux premiers mois de l’indépendance de l’Algérie.
Certes, depuis 1960, des milliers de Français d’Algérie sont déjà partis de ces départements français pour la métropole, sans prendre toutefois la forme d’un véritable exode. Antérieurement, les pouvoirs publics ont déjà eu à faire face au reflux de populations des anciennes possessions françaises qui accèdent à l’indépendance, comme l’Indochine, le Maroc et la Tunisie et dans une moindre mesure l’Afrique noire, ou suite aux expulsions d’Égypte des ressortissants français.
​
De 1956 à 1961, ce sont près de 500 000 personnes qui s’installent sur le territoire métropolitain, première expérience de ce type de migration politique. Cependant, l’exode des rapatriés d’Algérie est différent par son aspect massif. Ainsi, en quatre mois, il y eut autant de réfugiés qu’en cinq ans pour les précédentes migrations liées à la décolonisation française.

2Jusqu’en mars 1962, les Français d’Algérie dans leur ensemble espèrent encore une solution qui mettrait un terme à cette « guerre sans nom ». Les accords d’Évian, signés le 18 mars 1962 et proclamés le lendemain, entérinent le cessez-le-feu sans que cela signifie l’arrêt de la violence. Ils doivent permettre la tenue d’un référendum d’autodétermination. Et dans la perspective quasi-assurée d’une indépendance de l’Algérie, ces accords stipulent que les biens et les personnes doivent être respectés [1][1]Charles-Robert Ageron, « Les Accords d’Evian…. Cependant, la fusillade de la rue d’Isly le 26 mars 1962 à Alger, les attentats OAS et FLN et, enfin, les enlèvements et assassinats, durant cette phase transitoire de la fin de l’Algérie française, précipitent l’exode vers la France, voire l’Espagne [2][2]Sempere Souvannavong Juan David, Los Pieds-Noirs en Alicante.…, des Français d’Algérie toutes origines confondues. Une partie des Français de souche nord-africaine — les FSNA pour reprendre la terminologie de l’époque —, engagés aux côtés de la France durant la guerre d’Algérie, réussit à prendre les chemins de l’exil devant les menaces et les premiers massacres dont ils font l’objet.

3C’est donc dans ce climat de violence que ces migrants coloniaux vont, en se réfugiant et en se réinstallant en France, former ce que l’on nommera désormais les rapatriés d’Algérie, qu’ils soient regroupés sous le vocable devenu si familier de pieds-noirs, de juifs d’Algérie ou de harkis. Cet article se veut ainsi une synthèse, dans le cadre d’une approche comparative, sur les conditions de départ en Algérie et d’accueil en France de ces populations.
De la diversité des rapatriés d’Algérie4

Derrière le terme de rapatriés d’Algérie se cache une réalité beaucoup plus complexe de ces hommes et ces femmes qui quittent l’Algérie pour des motifs politiques au sortir de la guerre.
Des Européens d’Algérie aux pieds-noirs5

La population la plus importante parmi les rapatriés d’Algérie est constituée des Européens, communément appelés pieds-noirs à partir de la fin de la guerre d’Algérie. Pour de nombreux auteurs, le terme de pied-noir, dont la genèse reste encore mystérieuse, réapparaît au milieu des années 1950 avec la guerre d’Algérie [3][3]Joëlle Artigau-Hureau, « Les pieds-noirs existent-ils ? »,…. Sans s’arrêter sur les nombreuses explications pittoresques, l’emploi de cette formule proviendrait d’une bande de jeunes Européens, engagés contre l’indépendance, du quartier du Ma’arif à Casablanca, terme ensuite médiatisé par la presse locale en 1952-1953. L’expression passerait ensuite du Maroc à l’Algérie durant la guerre, employée de manière péjorative en 1962 puis revendiquée comme élément identitaire en France [4][4]Éric Guerrier, « En finir avec les….

6L’histoire de la présence française en Algérie débute en 1830 avec l’amorce de la conquête.
S’installe, dans les années qui suivent et jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, une population composite quittant leur patrie pour des raisons politiques, sociales ou économiques. Outre l’apport naturel des Français, il faut ajouter l’installation de nombreux étrangers d’Europe centrale (Allemands, Suisses) et surtout méridionale : les Espagnols [5][5]Jean-Jacques Jordi, Les Espagnols en Oranie. Histoire d’une…, les Italiens [6][6]Gérard Crespo, Les Italiens en Algérie, Gandini, 1994. et les Maltais [7][7]Marc Donato, L’émigration des Maltais en Algérie,….
En 1847, 47 724 Français, 31 528 Espagnols, 8 788 Maltais et 8 175 Italiens sont présents en Algérie [8][8]Charles-André Julien, Histoire de l’Algérie contemporaine,….
Avec la loi du 24 juin 1889, tous les fils d’étrangers nés en Algérie sont naturalisés automatiquement. En 1901, 583 844 personnes d’origine européenne sont établies en Algérie.
En 1960, 1 021 047 Français « de statut civil de droit commun » résident en Algérie, la majorité des « musulmans », quoique Français, demeurent sous le statut de droit local musulman ou berbère.
7Ainsi, cette population d’Algérie constitue une population largement hétérogène par ses origines. La conscience commune d’appartenir à une même « communauté » ne se dessine véritablement qu’avec la rupture de 1962, l’exil constituant le groupe social pied-noir.

Des israélites indigènes aux juifs d’Algérie8Généralement, les juifs d’Algérie sont étroitement associés aux Européens d’Algérie, même si pour certains, ils constitueraient une population distincte que seule l’année 1962 et le départ pour la France lierait aux pieds-noirs.
9Une population particulière du fait d’une histoire singulière par la présence du judaïsme qui est attestée en Algérie depuis au moins 2000 ans [9][9]Richard Ayoun et Bernard Cohen, Les Juifs d’Algérie, deux mille…. À ceux-ci, s’ajoutent les juifs expulsés d’Espagne en 1492, constituant alors des communautés urbaines très importantes à Oran, Tlemcen, Alger, Constantine, et pratiquant le rite sépharade différent du rite ashkénaze des juifs d’Europe centrale et orientale. Le 24 octobre 1870, le ministre de la Justice, Adolphe Crémieux, chargé des Affaires algériennes, propose la naturalisation collective des israélites d’Algérie. Le décret Crémieux fut le point de départ de l’intégration, voire de l’assimilation, des juifs d’Algérie à la France : « Les israélites indigènes des départements de l’Algérie sont déclarés citoyens français : en conséquence, leur statut réel et leur statut personnel seront, à compter de la promulgation du présent décret, réglés par la loi française : tous droits acquis jusqu’à ce jour restent inviolables. »


10Par l’accomplissement d’un profond processus d’assimilation à la culture française (primauté à la langue française et à l’apprentissage de l’histoire de France, francisation du judaïsme algérien, distance vis-à-vis de la culture arabe), et malgré la « crise antijuive » de la fin du XIXe siècle, l’antisémitisme des années 1930 et l’épisode vichyssois avec l’abolition du décret Crémieux, les juifs d’Algérie se sentent pleinement appartenir à la nation française. Le départ de l’Algérie indépendante vers la France, est alors un choix logique comme pour les Européens d’Algérie. Estimés à 120 000 personnes en 1962, environ 110 000 s’installent en France, tandis que quelques milliers d’autres se dirigent vers Israël suivant en cela nombre de juifs du Maroc et de Tunisie [10][10]Jean-Louis Miege et Colette Dubois (dir), L’Europe….
Des Français de souche nord-africaine (FSNA) aux Français musulmans rapatriés (FMR)11Englobés sous le terme générique de « harkis » ; les Français musulmans rapatriés sont considérés, pour les uns, comme l’archétype du traître à sa patrie et pour les autres, d’une manière emblématique, les considérant comme d’héroïques combattants de la patrie française [11][11]Fatima Besnaci-Lancou, Abderahmen Moumen, Les Harkis, Paris, Le….
Néanmoins, il faut souligner et préciser la diversité de cette catégorie de rapatriés, qui ne le sont devenus que par leur engagement en faveur de la France durant la guerre d’Algérie. En premier lieu, et constituant le plus grand groupe, nous trouvons les FSNA/musulmans/Algériens — selon que l’on décide de prendre une terminologie d’ordre juridique, coloniale ou territoriale — qui avaient le statut de supplétifs.

12Cinq catégories de formations supplétives civiles sont ainsi progressivement mises en places pour contribuer au « maintien de l’ordre » durant ce que l’on nomme pudiquement « les événements » : les goumiers des Groupes mobiles de police rurale (GMPR) transformés ensuite en Groupes mobiles de sécurité (GMS), les mokhaznis chargés de la protection des Sections administratives spécialisées (SAS), les ‘assas (gardiens) des Unités territoriales (UT), les groupes d’autodéfense (GAD), et enfin, les plus connus, les harkis, composant les harkas — de l’arabe mouvement — , salariés embauchés localement, au départ journalier puis sous contrat d’un mois renouvelable, dont les blessures sont considérées comme des « accidents du travail ».

13Dans la continuité d’une longue tradition coloniale d’emploi d’auxiliaires ou réguliers autochtones de l’expansion coloniale du XIXe siècle à la guerre d’Indochine, dans la situation d’une dégradation des conditions de vie de la paysannerie algérienne, dans le contexte de violence des acteurs de la guerre d’Algérie prenant comme enjeu une population rurale à conquérir de gré ou de force, avec des raisons multiples d’engagement ou d’enrôlement, les supplétifs — dont l’objectif politique surpasse l’utilité militaire — sont devenus à la fois un instrument et un enjeu durant ce conflit.

14Les harkis ne sont finalement qu’une composante dans l’ensemble des formations supplétives mises sur pied pour suppléer l’armée française durant ce conflit. Ce terme s’étend par la suite à l’ensemble des supplétifs du fait de l’importance numérique des harkis au regard des autres unités (63 000 en janvier 1961). Après la venue en France de ceux que l’on désignera par « Français musulmans rapatriés », le terme harkis amalgame tous ces hommes qui se sont placés du côté de l’armée ou du gouvernement français (environ 250 000 personnes en février 1961). Qu’ils soient militaires engagés, ou appelés soumis à la conscription, auxiliaires administratifs vestiges d’un certain ordre colonial (bachaga, agha, caïd), fonctionnaires ou élus, nombre d’entre eux sont ainsi qualifiés à tort de « harkis ».
Le repli d’Algérie, une migration politique sous contrainte151962 est la date du départ en masse de ces repliés. Mais, s’il est exact que la grande majorité des rapatriés d’Algérie est venue en 1962, les rapatriés installés en France avant et après 1962 ne constitue pas une part négligeable [12][12]Jean-Jacques Jordi, De l’exode à l’exil en France : rapatriés…. Les facteurs déterminants de l’exode de 1962 sont fonction de la violence des derniers mois de l’Algérie française [13][13]Jean Monneret, La phase finale de la guerre d’Algérie,….

L’exode des français d’Algérie imprévu
16Lorsqu’en 1962, la grande majorité des Français d’Algérie fuient l’Algérie pour se réfugier en France, ce phénomène brutal et massif prend totalement de court l’État et le gouvernement français [14][14]Jean-Jacques Jordi, 1962 : L’Arrivée des pieds-noirs,…. Ce dernier avait évalué que 400 000 personnes résidant en Algérie viendraient s’installer en France sur quatre ans, sous-estimant l’attachement des Français d’Algérie à demeurer Français à l’intérieur d’institutions françaises.
17L’arrivée des rapatriés d’Algérie s’est progressivement accélérée parallèlement aux événements et aux épisodes dramatiques et parfois sanglants des derniers mois de l’Algérie française. Déjà, certains mouvements démographiques, relevés par Daniel Lefeuvre, préfiguraient la « grande ruée de 1962 » : « repli du bled vers les villes ; repli des quartiers périphériques ou ethniquement mêlés des villes vers les quartiers européens ; repli enfin vers la métropole, d’abord des capitaux, puis des enfants [15][15]Daniel Lefeuvre, « Les trois replis de l’Algérie française »,…. »

18Vers la fin de l’année 1961, le nombre, alors relativement faible, de personnes regagnant la métropole augmente sensiblement. En mars et avril 1962, après la signature des accords d’Évian, le mouvement demeure toujours lent. L’espoir toujours présent d’un règlement favorable de la guerre pour les Français d’Algérie et la présence toujours importante et visible de l’armée française expliquent cela. Cet état d’esprit d’attentisme est modifié par la répression des diverses manifestations pour le maintien de la France en Algérie dont la plus connue est la fusillade de la rue d’Isly le 26 mars 1962 qui se termine en drame. L’armée française tire sur une foule désarmée faisant 61 morts et une centaine de blessés.

19Interdisant tout départ des Français d’Algérie vers la métropole, les activistes de l’Organisation armée secrète (OAS) orientent leurs actions vers une politique de terre brûlée jusqu’en juin 1962. Ainsi, à partir du mois d’avril et jusqu’au mois d’août 1962, le reflux des Français d’Algérie s’accélère pour devenir un exode brutal et désordonné avec un pic de 450 000 départs en mai et juin. Au sentiment de ne plus être protégé par l’armée française, s’ajoute l’insécurité latente à laquelle sont confrontés les Européens d’Algérie avec les enlèvements, les assassinats, les attentats et exécutions sommaires dont l’exemple le plus marquant est le massacre d’Oran les 6 et 7 juillet. Entre le 19 mars et le 31 décembre 1962, 3 018 personnes auraient été enlevées, sur lesquelles 1 245 auraient été retrouvées et 1165 seraient décédés [16][16]Chiffres présentés au Sénat par Jean de Broglie, secrétaire….

20Les juifs d’Algérie, sans pour autant constituer un ensemble homogène, sont quant à eux face à un dilemme : entre leur enracinement millénaire sur cette terre algérienne et leur attachement à la citoyenneté française. Tentée par une certaine neutralité durant la guerre d’Algérie, malgré le soutien de certains au FLN ou l’engagement d’autres au sein des commandos OAS, l’assassinat de la personnalité de Cheikh Raymond à Constantine en juin 1961, les attentats et les affrontements communautaires convainquent la majorité des juifs d’Algérie à quitter finalement l’Algérie dans le flot des réfugiés de 1962 [17][17]Benjamin Stora, « L’impossible neutralité des juifs….

21À partir du mois de septembre 1962, les départs diminuent tout en demeurant un mouvement important car à l’insécurité physique succède l’insécurité économique avec la progressive déliquescence de l’économie algérienne et le sentiment de n’avoir plus de place dans la nouvelle Algérie indépendante.

Le transfert limité des « musulmans menacés »
22La signature des Accords d’Évian scelle l’avenir des supplétifs. La question est claire tant pour le gouvernement que pour l’état-major des forces françaises en Algérie. N’étant pas de statut militaire, étant pour la plupart des citoyens de statut de droit local (différent de la majorité des Européens d’Algérie de statut de droit civil), considérés — politiquement parlant — comme de futurs algériens du nouvel état indépendant, ils doivent être rendus à la vie civile, désarmés et renvoyés dans leur foyer. Seule une minorité, les anciens supplétifs qui souhaitent s’engager dans l’armée française — et considérés comme aptes bien entendu — et ceux — avec certains civils — considérés comme réellement menacés seront transférés en métropole. Les militaires de carrière, fonctionnaires qui le souhaitent et certaines personnalités politiques, tels que le Bachaga Boualam, sont, quant à eux, officiellement rapatriés en France.

23Ainsi, pour les harkis spécifiquement, le décret du 20 mars 1962 leur offre trois solutions qui doivent permettre de laisser la grande majorité d’entre eux en Algérie : l’engagement dans l’armée régulière pour une minorité, revenir à la vie civile avec primes de licenciement et de recasement ou reconduire un contrat de six mois pour leur laisser un temps supplémentaire de réflexion.

24Cette politique préalable de limitation volontaire du nombre de transférés est liée à plusieurs considérations. Les anciens supplétifs sont considérés par le gouvernement globalement comme un groupe inadaptable à la société française, risquant ainsi de devenir une charge voire « des épaves », pouvant même être récupéré par l’OAS qui poursuit sa guerre car opposée aux accords d’Évian. De plus, leur afflux dans un contexte de probable départ de nombreux Européens d’Algérie était perçu comme un problème supplémentaire encombrant pour le secrétaire d’État chargé des Rapatriés.

25L’afflux éventuel d’une masse de réfugiés serait aussi l’aveu d’un échec de « l’esprit de coopération » des accords d’Évian. L’objectif de ceux-ci était de permettre à tous, anciens supplétifs comme Européens d’Algérie, de demeurer massivement en Algérie, le nombre de départ devait être le fait de quelques cas isolés. Les pouvoirs publics souhaitaient aussi ne pas envenimer les relations avec le futur gouvernement algérien avec l’accueil d’anciens supplétifs susceptibles de devenir des opposants potentiels. Enfin, la perspective de représailles à l’encontre de tous ceux qui avaient servis au sein de l’armée française, dans les formations supplétives, ou dans l’administration était minorée par le gouvernement, malgré les nombreux avertissements d’officiers et sous-officiers des forces armées françaises en Algérie.

26Sous le prétexte d’une récupération — tout simplement exceptionnelle en réalité — des anciens supplétifs par l’OAS, des mesures coercitives sont prises par le ministère des Armées, Pierre Messmer, le ministre de l’Intérieur, Roger Frey et le ministre d’État Louis Joxe, en charge des Affaires algériennes, pour empêcher leur installation en France par le biais de filières clandestines. Filières mises en place par des responsables de formations supplétives (en activité ou qui ont démissionné pour ne pas contrevenir aux ordres), craignant pour la vie de leurs anciens « compagnons d’armes » et leurs familles, ils utilisent tous les moyens pour les exfiltrés en France.

27Malgré les mesures de limitation des transferts, ce sont, à la fin du mois de juin 1962, plus de 10 000 personnes (harkis, moghaznis, membres des groupes d’autodéfense et leurs familles) qui sont officiellement parvenues en France, plus quelques centaines d’autres qui ont pu s’installer par le biais de filières individuelles. Le flot ne se tarit cependant pas puisque des milliers d’autres, fuyant les violences de l’après-indépendance, se réfugient dans des camps de regroupement en Algérie en instance de départ vers la France.

Rapatriés, repliés ou réfugiés ?
28Inscrit dans le mouvement général des migrations liées à la décolonisation, et plus particulièrement des migrations politiques sous contrainte, doit-on nécessairement parler de rapatriés ? Les termes de réfugiés ou de repliés sont d’ailleurs souvent employés au gré des circonstances. Outre la diversité de ces migrants de la décolonisation qui fuient l’Algérie pour se réfugier dans l’ancienne métropole coloniale, le statut ambigu de ce territoire sous souveraineté française complexifie encore la situation.
29Ses habitants étaient partagés entre citoyens français de statut de droit commun et les citoyens français de statut de droit local. Le terme rapatrié signifie un retour à sa patrie, mais beaucoup ne possédait de la France qu’une image un peu mythique. Un réfugié, en terme de droit, est une personne qui a dû fuir son pays ou son lieu de résidence et qui trouve asile dans un nouveau pays. Sont-ce des rapatriés ou des réfugiés ? Des Algériens ou des Français ? La question est particulièrement pertinente à l’endroit des anciens supplétifs, puisque l’on emploiera pour ces derniers le terme de transfert au lieu de rapatriement.
Si la majorité des Européens d’Algérie viennent en France en tant que citoyens français, certains possèdent encore leur nationalité d’origine (espagnole ou italienne), nécessitant des ajustements pour le bénéfice du statut de rapatriés que procure la loi Boulin votée le 26 décembre 1961.
La majorité des FSNA, et particulièrement les anciens supplétifs, doivent effectuer une demande récognitive de nationalité française.

Malgré les promesses faites en février et mars 1962 par Louis Joxe, le Comité des affaires algériennes décide le 21 juin que les citoyens français d’Algérie de statut de droit local doivent déclarer individuellement leur volonté de vouloir rester français pour ne pas perdre leur nationalité à partir du 3 juillet. L’ordonnance du 21 juillet 1962 précise que cette déclaration doit se faire en territoire français et implique la soumission au Code civil. Les juifs du M’zab, dans le sud de l’Algérie autour de Ghardaïa, seule composante de la population juive à vivre sous le statut de droit local (droit coutumier mosaïque) bénéficient quant à eux d’une naturalisation collective afin de faciliter leur venue en France [18][18]Arrêté du ministre des Affaires algériennes, 13 juin 1962..


30L’imbroglio sémantique est d’ailleurs de mise concernant ces populations et particulièrement les Français musulmans rapatriés. Les termes employés dans les archives des ministères de l’Armée, de l’Intérieur ou du secrétariat (puis du ministère) chargé des rapatriés interpellent par le flottement des terminologies usitées concernant ces « musulmans » : transfert, repliement, rapatriement ; hésitant souvent entre « rapatriés musulmans » — pour différencier des « rapatriés européens » — et « réfugiés musulmans ». Dans les diverses correspondances, ils sont souvent identifiés comme réfugiés musulmans, réfugiés harkis, musulmans harkis, musulmans réfugiés, musulmans rapatriés voire pour certains afin d’éviter toute erreur musulmans algériens harkis [19][19]Abderahmen Moumen, « Reçus en harkis, traités en parias », in….

31Le terme de rapatriés d’Algérie, notion juridique utilisée par les pouvoirs publics, est ainsi à prendre avec précaution. De plus, à l’intérieur des trois populations principales, les dénominations peuvent varier, contribuant à la difficulté à désigner ces migrants. Le choix peut être restreint : entre Européens d’Algérie, Français de souche européenne (FSE), Français d’Algérie et pieds-noirs ; néanmoins, il peut être aussi extrêmement varié : Français de souche nord-africaine (FSNA), Français musulmans rapatriés (FMR), Français rapatriés de confession islamique (FRCI), Français de souche islamique rapatriés d’Afrique du Nord (FSIRAN) ou plus récemment Rapatriés d’origine nord-africaine (RONA). Dans le cas des juifs rapatriés d’Algérie, ils se divisent entre ceux qui se dénomment pieds-noirs et ceux revendiquant une appartenance au judaïsme séfarade essentiellement, voire de pair pour certains.
Continuités des représentations coloniales : la hiérarchisation des rapatriés d’Algérie

32L’installation en France s’effectue cependant avec certaines spécificités : prioritaire pour les pieds-noirs, particulière avec la solidarité israélite et en marge pour les harkis, instaurant une certaine hiérarchisation des rapatriés, dans la continuité des représentations coloniales.

Un reclassement prioritaire : les pieds-noirs
33Les précédents retours des populations issues des anciennes possessions françaises (Indochine, Maroc, Tunisie pour l’essentiel) ont constitué des expériences pour les administrations locales face à des rapatriements étalés dans le temps. D’un flou juridique, la loi Boulin, votée le 26 décembre 1961, précise le statut des rapatriés et détermine les aides à leur accorder. Néanmoins, l’arrivée massive et imprévue des Français d’Algérie transforme les modalités de l’accueil. Par l’importance numérique du nombre de rapatriés d’Algérie s’installant, les pouvoirs publics ont, pour souci majeur, de juguler du mieux qu’ils peuvent les conséquences qui pouvaient être désastreuses pour le pays. Dans un contexte où l’accompagnement des autorités se superpose à leur surveillance par crainte des « groupes subversifs », la nécessité d’une administration d’accueil spécifique se fait sentir, administration dont l’aboutissement n’est autre que le ministère des Rapatriés, avec la nomination de François Missoffe en décembre 1962.
34Malgré l’interdiction en juillet 1962 de l’installation des rapatriés d’Algérie dans certains départements, saturés, du sud de la France comme les Bouches-du-Rhône, les Alpes-Maritimes, le Var, le Vaucluse…, leur nombre dans ces départements méridionaux, avec la région parisienne, reste impressionnant. Au 1er janvier 1963, selon l’Insee, 60 % des rapatriés se situent dans ces deux zones géographiques. Phénomène d’ancrage qui se poursuivra tout au long des années 1960, puisque les rapatriés s’établissent surtout dans la moitié sud de la France (Provence, Languedoc-Roussillon, le sud-ouest autour des villes de Bordeaux et de Toulouse, et la vallée du Rhône avec les villes de Lyon et de Grenoble), et, bien évidemment, la région parisienne. Dans ce mouvement d’installation géographique des rapatriés d’Algérie, ces derniers s’établissent dans leur grande majorité dans les villes, reproduisant en cela la situation en Algérie. Ainsi, 50 % de l’essor urbain de la ville de Marseille, et de bien d’autres villes aussi, est imputable aux rapatriés.

35Devant l’afflux, les possibilités de logement sont largement saturées et des mesures d’urgence sont ainsi ordonnées (réquisitions de locaux vacants, construction de programmes spéciaux d’HLM). Pour soutenir les plus démunis, des centres d’accueil et/ou d’hébergement sont gérés par les services de la préfecture, dont certains perdurent jusqu’en 1965 ! Les personnes âgées constituent, dans cet océan de détresse, une catégorie de rapatriés parmi les plus touchées par la transplantation.

36Concomitant au logement, le reclassement socioprofessionnel constitue la deuxième difficulté majeure pour l’installation des rapatriés en métropole. A contrario de certaines idées développées en France, les pieds-noirs constituaient une population largement modeste, formée essentiellement de fonctionnaires, de salariés et commerçants. En Algérie, ils possédaient un niveau de vie inférieur de 10 à 15 % à celui des métropolitains.

37L’État français est ainsi dès le départ confronté à un hiatus entre les priorités nationales et la structure socioprofessionnelle des pieds-noirs. On trouvait parmi ceux-ci en premier lieu des employés et des cadres des services publics ou privés. Mais, la France recherchait pour son développement des techniciens, des ouvriers qualifiés, des manœuvres : c’est-à-dire une main-d’œuvre industrielle. À cela s’ajoute encore la césure existant entre les offres d’emplois et le désir des pieds-noirs de s’installer dans le sud de la France, qui proposait beaucoup moins d’emplois. Deux axes majeurs composent ainsi les premières actions étatiques : encourager les réinstallations et former les rapatriés. La saturation du marché de l’emploi étant assez rapidement atteinte, l’opération « rapatriés » en préfiguration pour l’année 1963 forme, en cela, une réponse décisive et appropriée à ce devoir étatique, une opération dont l’objectif est de mobiliser les rapatriés vers le salariat.

38Les conséquences de la guerre, et surtout les modalités de sa résolution, constituent des pierres d’achoppement quant à la dissolution de ces populations au sein de la société française. L’amnistie, la question des disparus et l’indemnisation composent ainsi les thèmes de combats des associations de rapatriés. Les célébrations annuelles de journées de commémorations des « drames de l’Algérie française », avec le 26 mars et le 5 juillet, posent les jalons d’une mémoire commune et figée sur un passé douloureux. Les pieds-noirs, en tant que groupe social, s’affirment dans l’exil.

La solidarité israélite en exergue
39Outre les mesures des pouvoirs publics identiques à tous les rapatriés, 110 000 juifs d’Algérie, soit environ 15 % de l’ensemble des rapatriés, ont pu, à leur arrivée en France, compter sur l’appui et le soutien de la communauté juive de France, à l’instar d’ailleurs des autres communautés religieuses avec les Églises catholiques et protestantes et associations affiliées.

40Ils suivent le même mouvement d’installation que l’ensemble des rapatriés avec des concentrations dans la région parisienne, dans le Sud-Est, dans le Sud-Ouest et dans la région Rhône-Alpes. Ils s’installent cependant dans les villes où est déjà présente une forte communauté juive ashkénaze comme à Paris dont le faubourg Montmartre, Lyon, Marseille, Toulouse, Nice… Deux facteurs essentiels expliquent ce phénomène : comme pour l’ensemble des Européens d’Algérie, les juifs constituaient essentiellement des communautés urbaines ; ensuite, pour des raisons religieuses, la pratique du culte israélite ne peut se faire de manière isolée.
41Dès leur arrivée, les juifs rapatriés d’Algérie sont accueillis par leurs coreligionnaires de France qui les orientent et les guident vers les structures adéquates. Le Fonds social juif unifié (FSJU) crée ainsi un service d’accueil à leur intention : le bureau d’information et d’orientation pour les réfugiés et rapatriés d’Afrique du Nord. Ils les soutiennent dans leurs démarches en matière de logement et d’emploi, qui s’ajoutaient à toutes les autres aides spécifiques aux rapatriés d’Algérie.

42Ainsi, avec l’installation de plus d’une centaine de milliers de juifs rapatriés d’Algérie en métropole, une révolution dans le paysage juif de France s’effectue : d’un judaïsme profondément ashkénaze, le judaïsme français est subitement composé d’une majorité de juifs séfarades. Le rite étant différent, les ashkénazes ont dû laisser des synagogues aux séfarades pour pratiquer leur culte.
Cependant, la nécessité de construire de nouveaux lieux de culte s’est fait sentir là où la saturation était évidente dans des villes comme Paris ou Marseille. Des sections de l’association des juifs originaires d’Algérie, fondés par les grands rabbins Rahmim Naouri, David Askenazi, Jacques Lazarus, Haïm Cherqui et Ellen Djian se multiplient.
43Pour l’essentiel, les juifs d’Algérie s’insèrent et se fondent assez rapidement autant dans le paysage humain français que dans le tissu économique. Dès 1962, la particularité des juifs d’Algérie se fait ressentir. À la fois partie intégrante de ce « peuple pied-noir », ils conservent une spécificité historique, religieuse et culturelle. Une distinction qui annonce la future dissociation d’une partie de cette population du reste des pieds-noirs comme le remarque Benjamin Stora [20][20]Benjamin Stora, op. cit.
.
Les harkis, une transplantation en marge
44Si parmi les Français musulmans rapatriés, les notables musulmans, fonctionnaires et autres militaires sont reclassés à l’instar de l’ensemble des Français d’Algérie, il n’en est pas de même pour la majorité des anciens supplétifs et leurs familles. Hiérarchisation est ainsi faite par les pouvoirs publics, entre les populations en provenance d’Algérie, dans les modalités d’accueil. Continuités des représentations coloniales, ces populations sont perçues comme souhaitant une vie communautaire, refusant ainsi, par crainte d’incidents, des structures d’accueil similaire : les « Européens » entre eux, les « musulmans » entre eux [21][21]CAC 19920149/1. Note pour le préfet sur l’hébergement….

45Ainsi, aux Européens d’Algérie et aux notables musulmans, considérés comme des rapatriés sans équivoque, les anciens supplétifs sont soumis à un contrôle social, tout en étant traités en priorité par rapport aux migrants algériens traditionnels. Lors de l’arrivée des « notables musulmans » (élus, caïds et autres bachaghas) en France, les pouvoirs publics, à l’échelle départementale, ont pour consigne de les accueillir comme des Européens d’Algérie. C’est ainsi de ces notables musulmans à Toulon le 7 juillet 1962 où cette différence, vis-à-vis des supplétifs, est d’autant plus soulignée : il s’agit de « musulmans de qualité (entre guillemets dans le texte) devant être traités exactement comme des Européens [22][22]CAC 19910467/1. Courrier du sous-préfet de Toulon au préfet… ».

46Des camps de transit sont mis en place à destination des familles d’anciens supplétifs. Aux camps de Bourg-Lastic (Puy-de-Dôme) et Le Larzac (Aveyron), ouverts dès le mois de juin 1962, succèdent à partir de septembre, pour des raisons de saturation et d’hiver rigoureux, les camps de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) et de Saint-Maurice l’Ardoise (Gard) 
[23][23]Pour plus de précisions sur le camp de Saint-Maurice…, enfin celui de Bias (Lot-et-Garonne). Soumis à un encadrement militaire, alors qu’ils sont considérés comme des civils réfugiés, ils sont sous la juridiction d’une structure spécifique, en marge des autres rapatriés : le service d’accueil et de reclassement des Français d’Indochine et Français musulmans.

47Si le premier facteur à la mise en place des camps de transit est de permettre le reclassement d’une population non prévue au départ, et de surcroît non désirée, il s’agit aussi de protéger une population des risques de représailles en France. Les préfets des départements à forte implantation de migrants algériens et de structures du FLN, recensent à partir du mois de mai et tout au long de l’année 1962, des assassinats, des enlèvements, des extorsions d’anciens supplétifs. Craignant une extension de ces représailles, voire la poursuite en France de la guerre d’Algérie entre groupes d’anciens supplétifs et groupes du FLN, certains préfets demandent d’ailleurs l’interdiction de l’installation d’anciens supplétifs dans leur département. La fin de l’année 1962 annonce cependant une accalmie dans ces règlements de compte, ce qui entraîne une protection moins poussée.

48En même temps que soumis à une protection particulière, les anciens supplétifs sont suspectés d’une possible collusion voire récupération de la part de l’OAS qui poursuit ses attentats en France, afin d’assassiner ceux qui ont « liquidé » l’Algérie française, De Gaulle en tête, ou de permettre le renversement de son « régime ». Les camps de transit et les concentrations de familles d’anciens supplétifs sont ainsi l’objet d’une surveillance singulière en attendant leur progressif reclassement aux quatre coins de l’hexagone.

9Dernier épisode des migrations politiques liées à la décolonisation de l’Empire français, l’arrivée de plusieurs centaines de milliers de Français d’Algérie fuyant les violences de la fin de la guerre d’Algérie est un bouleversement démographique imprévu en 1962, tant par son ampleur que sa concentration dans le temps. Si pour les pieds-noirs et juifs d’Algérie, l’exode est la conséquence de l’action de l’OAS, de l’insécurité générale et de l’ambiguïté de leur place dans la future Algérie indépendante, pour les « harkis », les violences à leur endroit les poussent massivement à fuir. Les pouvoirs publics se doivent ainsi de relever de nombreux défis : l’organisation d’une administration d’accueil spécifique, la résolution de la saturation de logements et le problème de l’emploi. Une prise en charge qui dénote certaines continuités des représentations coloniales avec la hiérarchisation des rapatriés, séquelles de l’Algérie coloniale. Aux revendications d’ordre matériel, les rapatriés d’Algérie, pieds-noirs, juifs d’Algérie et harkis, s’orientent progressivement vers des quêtes identitaires qui révèlent de manière ostentatoire l’hétérogénéité d’une population que seules l’Algérie et l’année 1962 lient réellement. Au sein de ce « passé qui ne passe pas », pour reprendre l’expression de l’historien Henry Rousso, les conflits de mémoires des divers acteurs de la guerre d’Algérie s’immiscent dorénavant dans les relations franco-algériennes. A.M.
Notes
  • [1]
    Charles-Robert Ageron, « Les Accords d’Evian (1962) », Vingtième Siècle, 35, juillet-septembre 1992, pp. 3-15.
  • [2]
    Sempere Souvannavong Juan David, Los Pieds-Noirs en Alicante. Las migraciones inducidas por la descolonizacion, coll. Publicaciones de la Universidad de Alicante, Mémoria de licenciatura : Geografia humana, Universidad de Alicante, 1997.
  • [3]
    Joëlle Artigau-Hureau, « Les pieds-noirs existent-ils ? », in Charles-Robert Ageron (sd), L’Algérie des Français, Point-Histoire, Éditions du Seuil, Paris, 1993, pp. 329-334 ; Michèle Baussant, Pieds-noirs, mémoires d’exils, Stock, 2002, pp. 396-411 ; Jean-Jacques Jordi, Les Pieds-noirs, Paris, Le Cavalier Bleu, 2009.
  • [4]
    Éric Guerrier, « En finir avec les pieds-noirs », L’Algérianiste, n° 95, 2001, pp. 44-46.
  • [5]
    Jean-Jacques Jordi, Les Espagnols en Oranie. Histoire d’une migration. 1830-1914, Gandini, 1996.
  • [6]
    Gérard Crespo, Les Italiens en Algérie, Gandini, 1994.
  • [7]
    Marc Donato, L’émigration des Maltais en Algérie, Montpellier, Africa Nostra, 1985.
  • [8]
    Charles-André Julien, Histoire de l’Algérie contemporaine, Paris, Puf, 1964, pp. 250-251.
  • [9]
    Richard Ayoun et Bernard Cohen, Les Juifs d’Algérie, deux mille ans d’histoire, Éditions Jean-Claude Lattès, coll. Judaïques, Paris, 1982.
  • [10]
    Jean-Louis Miege et Colette Dubois (dir), L’Europe retrouvée. Les migrations de la décolonisation, Paris, L’Harmattan, 1994, p. 94.
  • [11]
    Fatima Besnaci-Lancou, Abderahmen Moumen, Les Harkis, Paris, Le Cavalier Bleu, 2008.
  • [12]
    Jean-Jacques Jordi, De l’exode à l’exil en France : rapatriés et pieds-n en France, Paris, L’Harmattan, 1993.
  • [13]
    Jean Monneret, La phase finale de la guerre d’Algérie, Paris, L’Harmattan, 2000.
  • [14]
    Jean-Jacques Jordi, 1962 : L’Arrivée des pieds-noirs, Paris, Autrement, 1995.
  • [15]
    Daniel Lefeuvre, « Les trois replis de l’Algérie française », in Jean-Charles Jauffret (dir), Des hommes et des femmes en guerre d’Algérie, Paris, Autrement, 2003, pp. 56-72.
  • [16]
    Chiffres présentés au Sénat par Jean de Broglie, secrétaire d’État aux Affaires algériennes, en 1964.
  • [17]
    Benjamin Stora, « L’impossible neutralité des juifs d’Algérie », in Mohammed Harbi, Benjamin Stora (dir), La guerre d’Algérie. 1954-2004. La fin de l’amnésie, Paris, Laffont, 2004, pp. 287-315.
  • [18]
    Arrêté du ministre des Affaires algériennes, 13 juin 1962.
  • [19]
    Abderahmen Moumen, « Reçus en harkis, traités en parias », in Driss El Yazami, Yvan Gastaud, Naïma Yahi (dir.), Générations. Un siècle d’histoire culturelle des Maghrébins en France, Gallimard, Génériques/CNHI, 2009, pp. 117-123.
  • [20]
    Benjamin Stora, op. cit.
  • [21]
    CAC 19920149/1. Note pour le préfet sur l’hébergement des rapatriés musulmans, 29 janvier 1964.
  • [22]
    CAC 19910467/1. Courrier du sous-préfet de Toulon au préfet du Var, 9 juillet 1962.
  • [23]
    Pour plus de précisions sur le camp de Saint-Maurice l’Ardoise, Abderahmen Moumen, « Saint-Maurice l’Ardoise : 1962-1976. Du camp de transit à la cité d’accueil », in Fatima Besnaci-Lancou et Gilles Manceron (dir), Les harkis dans l’histoire de la colonisation et ses suites, Éditions L’Atelier, 2008, pp.131-146 ; Abderahmen Moumen, Les Français musulmans en Vaucluse (1962 – 1991). Installation et difficultés d’intégration d’une communauté de rapatriés d’Algérie, Paris, L’Harmattan, 2003.
Arrivée des Harkis à Larzac
13 juin 1962.Premiers rapatriement de harkis en Aveyron.
Arrivée des Harkis à Marseille
23 juin 1962
Transit des Harkis à Marseille
​259 harkis et leurs familles, rapatriés d'Algérie par le porte-avions La Fayette, débarquent à Marseille. Ils transitent par l'enceinte militaire du port avant d'être convoyés au camp de Bourg-Lastic dans le Puy-de-Dôme.23 juin 1962.
Harkis à Marseille
23 juin 1962.Arrivée à Marseille des rapatriés harkis en provenance d'Algérie
Réfugiés musulmans dirigés par train sur des centres d'accueil  
1er Juillet 1962
L'Ouest en mémoire - Inauguration d'un village de harkis à Saint Avé
En 1964, Saint-Avé, village rural du Morbihan, accueille quelques dizaines de réfugiés harkis. C'est une exception dans cette partie du pays car la majorité des harkis va s'installer dans les villages du Midi de la France.
​Les Harkis à Nantes
​06 févr. 1965.La prison militaire désaffectée de la rue de la miterie à Nantes
​abrite 34 familles de harkis : Le sujet montre les conditions précaires dans lesquelles vivent ces réfugiés.
​
  • Numéro 137
  • Vie et bonté : France Croix-Rouge : organe officiel de la Croix-Rouge française Mars 1963
Photo
Pour nos dernières nouvelles, suivez nous sur Facebook

Recevoir la charte et rejoignez la communauté militante

La charte signée et retourné est en  préalable aux requêtes en indemnisations validées par nos avocats
je souhaite recevoir la charte
Photo
Photo

Celles et ceux qui souhaitent s'impliquer plus encore dans la mise en œuvre de ces actions sont les bienvenu(e)s.
Pour tout renseignement sur les différentes actions juridiques * qui ont été élaborées par nos militants et des avocats, contactez nous :
actionsjuridiques.harkis@gmail.com  

    Je rejoins la Communauté militante

Recevoir la Charte du Rassemblement Harki
Follow @MouvementHarki
Tweet to @MouvementHarki
Attestations de déplacement "couvre-feu"
Harkis à Nantes 1965
Plan du site 
  2016-2020 (C) Rassemblement Harki   Informer, rassembler, agir !   
Écrire au Web master  :  GENERATIONHARKI44@GMAIL.COM
 "On ne doit aux morts que ce qui est utile aux vivants, la Vérité et la Justice"
Le F.L.N 
Repères chronologiques

Qui sont les Harkis ?
La désinformation au sujet des Harkis et de l'histoire franco-algérienne

Traumatismes post-guerre
Mise au point

Connaitre les accords d'Évian
Croix-rouge 1963&Harkis prisonniers


  • Accueil
  • Le Rassemblement Harki
    • Qui sommes nous ?
    • Agissons !
    • Agenda&Galerie
  • ***ACTIONS JURIDIQUES***
    • La charte
    • Nos objectifs
    • Juridique >
      • Rapports&Etudes
      • Analyses
      • Textes légaux
      • Décisions
      • Traités&Conventions
      • Propositions de loi
  • *A la une !
  • *Histoire&Mémoires
    • Qui sont les Harkis ?
    • L'Armée d'Afrique et l'armée coloniale des origines à 1962
    • Les suppletifs rallies dans les guerres irregulieres
    • Harkis et supplétifs
    • Les oublies d Indochine
    • De la colonisation a la pacification de l’Algerie
    • Le F.l.n
    • Les Européens disparus en Algérie >
      • Liste nominative de disparus
    • Repères chronologiques
    • Mise au point
    • L' abandon des Harkis >
      • Les accords d'Évian
      • Le massacre des Harkis
      • Croix-rouge 1963&Harkis prisonniers
      • Les justes
      • L' accueil des Harkis
      • Les camps
      • Traumatismes-post-guerre"
    • *Témoignages&Contributions
    • *À voir, à lire
  • Infos pratiques&Nous contacter
    • Plan du site